Aujourd’hui, je découvre que porter un nom de famille aussi lourd que le notre peut être plus difficile à porter que je ne l’aurai jamais cru… Lucilius-Taylor, chacun en a déjà entendu parler, Dominius Lucilius, mon père est issu d’un famille très ancienne qui tire ses origines de la Rome antique, si on en croit l’arbre généalogique, le fondateur de notre famille était un certain Caius Lucilius, d’origine salienne, fils de Vulcain.  Dès lors, nous avons toujours eu un pied au sénat ou en politique, ce qui n’a évidemment pas changé de nos jours… Ma mère quand à elle, est une descendante de Mars, tirant ses origines de la ville de Washington D.C. mais particulièrement influente, c’est comme cela que ça marche chez nous. Tout est question d’influence et de la garder, la raison avant les intérêts du cœur. Je croyais pouvoir réussir à me détacher, je croyais en notre intégrité, puis petit à petit, je me rends compte que le poids de notre passé pèsera à jamais sur nos épaules. Entre trafic d’influences, mensonges, traitrise et coups bas, notre aura ne m’apparaît pas aussi puissante et bienfaitrice que je le pensais… Assise en tailleur sur mon lit, un cartons de vieilles photos jaunies par le temps, des lettres et de coupures de presses le parsèment. Les scandales étouffés par nos ancêtres, leurs manipulations, je ne sais même plus par quoi commencer.


Mon souffle se ralenti quand je tombe sur l’une des lettres de l’un de mes ancêtres à son père, le remerciant pour l’affaire qu’il a étouffée, que ça lui a permis de le propulser au rang de prêteur. De quoi parle il ? Les vieilles coupures de presses me donnent de maigres informations en plus, un prêteur aurait été disgracié, un certain Keith Blackwood, jugé pour traitrise, infamie et ainsi de suite. Keith, comme ce type que j’avais croisé au camp, et que j’avais revu par la suite, ce dragueur de première. Je le vire de mon esprit, il y a plus grave pour l’instant, surtout que la je parle de ma famille, je ne vois même pas pourquoi je pense à lui… Sur ce, je me reconcentre sur les différentes pièces du dossier.
S’en suive les lettres, les convocations diverses et variées. Je n’aurai jamais du tomber sur tout cela, le dit carton se trouvait avec d’autres pièces compromettantes dans une porte dissimulée du grenier de la villa qui appartient à notre famille depuis maintenant plusieurs générations. Puis je tombe sur des pièces plus neuves, compromettant mon père, aujourd’hui sénateur. Soudain, une porte s’ouvre à la volée, et mon frère de 14 ans Harlan, le petit dernier des 5 enfants que nous sommes, entre dans la pièce. Je ne sais même pas comment j’ai eu assez de temps pour rabattre une couverture sur les documents et attraper le livre sur la table de chevet.  «  Sky ! Regarde ça ! Faut que je te montre ce que je sais faire ! » Soudain, il se concentre parvenant à changer ses ongles en griffes… Des griffes de loup. C’était pas trop tôt, un sourire étire mes lèvres, tentant d’oublier que ma famille est une famille de vendus et que j’ai juste une seule envie : poursuivre mes recherches. Mais je me souviens moi même de la réaction de mon frère ainé  quand je lui ai montré pour la première fois que je contrôlais la lave. Sauf qu’il a été un peu moins fier que je ne le suis actuellement d’Harlan, puisque moi, à l’époque j’avais fait un trou énorme dans le salon, apprenant par la même occasion que le magma est particulièrement difficile à gérer. Je me lève de mon lit, ébouriffant les cheveux de mon frère avant de l’attirer dans mes bras. «  Je suis tellement fière de toi, ça vient d’arriver ou ça fait plusieurs fois que tu as les signes précurseurs ? »  « Non, c’est la première fois, je me suis énervé contre mon jeu vidéo, et tout a coup, mes ongles se sont transformé en griffe… Tu crois que j’ai le même pouvoir que toi ? » Il s’extirpe de mes bras, se rappelant que désormais il est un ado qui ne doit pas montrer ses sentiments, en pleine crise existentielle. Mais je ne peux rien lui reprocher, à 24 ans, je suis incapable de gérer mes sentiments et autres émotions, si bien que je montre une toute autre image de moi aux yeux du monde. «  Peut être bien !  Il faudrait que tu viennes t’entrainer avec moi un de ces jours, je pourrais te montrer si tu veux… » « Tu ferais ça ? » «  Si je te le propose… »

Harlan me fait beaucoup penser à moi à son âge, enfant j’étais mal dans ma peau, j’étais la risée de mes camarades qui se moquaient de moi sans véritables raisons, je ne savais régler mes différents que d’une seule et unique manière, par la force. J’ai changé du tout en entrant dans la légion, même si mon coté fougueux n’a jamais disparu. J’ai fini par devenir centurion de ma cohorte à l’âge de 16 ans, poste que j’occupe désormais depuis. Les séquelles de mon enfance m’ont permis de tenir le coup et surtout, de protéger les plus faibles que moi, d’en faire une force et non une faiblesse, je déteste les injustices.
Harlan disparaît de ma chambre aussi rapidement qu’il est arrivé, allant avertir les autres membres de notre famille de l’apparition de son second pouvoir, je referme la porte sur lui, enlevant la couverture de mon lit pour me replonger dans l’histoire de ma famille. Des magouilles, des affaires étouffées, des mariages arrangés, a vrai dire, ça ne devrait même pas me surprendre, j’en ai moi même fais les frais à mes dix huit ans.

Tout a commencé quand j’avais dix sept ans, un jour du mois de mai, alors que je rentrais d’un entrainement avec ma cohorte, équipement sous le bras, je passais la porte de la maison ou se trouvait tout le gratin de la nouvelle Rome dont Jake et sa famille. Qui était il ? Le centurion à l’époque de la seconde phalange, on se connaissait, tout comme moi il était leg de Mars. N’aimant pas vraiment les soirées trop pompeuses dont mes parents avaient l’habitude, j’allais filer dans ma chambre quand ma mère est arrivée a mes cotés, m’attrapant par le bras avant de demander l’attention de toute l’assemblée présente dans notre salon. « La fiancée est arrivée ! Juste le temps de se faire une beauté et nous pourrons célébrer les fiançailles de Jake et Skylar. » Sur le coup l’idée de fuir le camp et de changer d’identité pour un nom tel que Thessalia me traversa l’esprit tandis que je fusillais ma mère du regard. Imaginez un peu la scène que je lui ai faite quand elle m’a faite monter dans ma chambre pour passer la robe qu’elle m’avait achetée spécialement pour l’occasion…
Bien entendu, je n’avais pas eu mon mot à dire, et je me retrouvais deux mois après mon dix huitième anniversaire, mariée à un type que je n’aimais pas, forcée par mes parents qui voyaient cette union une façon de garder notre intégrisme politique intact, de même que conserver notre ascendance divine. Avais-je oublié de préciser que le père de Jake travaillait au sénat ? Ca a été une véritable catastrophe, Jake était un type violent, voulait à tout prix me faire quitter mon poste de centurion, n’appréciant pas que « sa femme » puisse exceller au sein de la première cohorte et ainsi de suite. J’ai tenu 3 ans, pour mes proches, pour tenter de faire avec en me disant que c’était d’usage dans notre famille, autant dire que ça n’a pas marché et qu’une de ses crises m’a laissée sur le carreau. C’est même mon père qui a demandé le divorce pour moi. Depuis je suis rentrée à la villa, et dès que mes parents me parlent de mariage je vois rouge, leur rappelant amèrement l’échec de ma précédente union.

Je m’allonge sur mon lit, la tête embrumée par les informations qui se bousculent dans mon esprit et je ferme un instant les yeux. Un flash. Je revois les deux épreuve de Lupa, le froid, la neige me glaçant les os, devant survivre comme je le pouvais, tentant de ne pas prier la mort de venir me cueillir, le feux que j’ai du apprendre à ne pas craindre, canalisant ma colère pour surmonter la peur… Les images se floutent pour laissez apparaître celle du champ de bataille, celle d’Orthys, et celles contre Gaia se confondent, les hurlements emplissent mes oreilles, réminiscence de l’horreur du combat. Le sang qui coule à flot et qui colore mes mains, mon frère à mes cotés me faisant un clin d’œil qui se veut rassurant, son cadavre entre mes bras, une heure après, les larmes qui coulent telles un torrent sur mes joues. Ce fils d’Appolon qui tente de me raisonner alors que je serre dans mes bras le corps sans vie de Jordan Un frisson me parcoure, l’air me manque et je me réveille en sursaut, constatant que je me suis assoupie sans le vouloir. Ma main se crispe encore sur les draps du lit, mon rythme cardiaque reprend un rythme normal et je constate que ce n’est qu’un mauvais rêve… Je me passe la main sur les yeux, une envie de frapper dans un sac ou d'aller faire un tour à la forge me prends aux tripes, ma manière à moi de faire redescendre la pression...

Mon regard balaye les documents toujours éparpillés sur mon lit, et l’espace d’un instant, je serai presque tentée de prendre le carton et de le jeter au feu pour faire disparaître toute preuve. Mais je me sens d’attaque pour découvrir les secrets que cachent ma famille, je ne baissera pas les bras, abandonner ne fait pas partie de mon vocabulaire, vous pouvez me croire.