L’eau claire vient chatouiller ses orteils et Satin frémit en souriant en sentant le froid remonter jusqu’à ses chevilles. Autour d’elle les autres nymphes, naïades et dryades, s’amusent à jouer dans l’eau en riant aux éclats. Encore une matinée agréable. Le soleil réchauffe doucement sa peau qui laisse transparaître ses veines étrangement vertes. Quand l’une des naïades, pour plaisanter, lui envoie un jet d’eau dans le visage, Satin pouffe de rire avant de sortir de l’eau pour faire mine de bouder. Ce n’est pas censé durer longtemps – juste de quoi faire culpabiliser son amie – mais elle aperçoit au loin une silhouette terriblement familière. Faisant un signe de mains aux autres nymphes, elle accélère alors le rythme pour pouvoir rejoindre son ami Noah, bizarrement seul. En temps normal, elle le voyait souvent accompagné de tout un tas de gamins bruyants auxquels elle se joignait parfois. « Bouh ! » Hurle-t-elle en apparaissant devant lui comme un éclair – mais un éclair trempé.  « Qu’est-ce que tu fais ? Tu vas où ? Pourquoi t’es tout seul ? » Demande-t-elle en sautillant autour de lui comme une pile électrique avant de finir par se stopper quand le souffle vint à lui manquer. Elle était parfois tellement pleine d’énergie qu’elle en oubliait de reprendre son souffle – pas très malin hein ?

« Oh je sais. Tu prépares une surprise c’est ça ? » Le mot surprise réveille en elle un éclat de curiosité encore plus grand et ses yeux s’agrandissent, rempli d’étoiles. « Dis-moi que c’est une surprise. Est-ce que je peux t’aider ? J’adore les surprises. » Dit-elle doucement en regardant autour d’eux, comme pour vérifier que personne ne les écoute. Après tout, si quelqu’un les entend et va le répéter, ce ne serait plus vraiment une surprise - et Satin n’a aucune envie de gâcher la surprise. Enfin, s’il y a une surprise. Mais elle parle tellement qu’elle n’a même pas laissé le temps à Noah de lui répondre. Quelle malpolie ! Elle se tape doucement la tête avant de reposer ses yeux sur son ami, un petit sourire sur les lèvres.

Satin avait vu juste – il s’agissait bien d’une surprise vu la réaction de Noah. Celui-ci pose un doigt sur ses lèvres pour l’empêcher de continuer à parler, mais c’était peine perdue. Une fois lancée, elle était impossible à arrêter.

« C’est quoi ces gros cartons ? Y’a quoi dedans ? Je peux en avoir un ? » Articule-t-elle en chuchotant, faisant de son mieux pour ne pas trahir son ami. S’il préparait une surprise, elle ne voulait absolument pas la gâcher. Enfin, pas volontairement. Elle était tellement agitée qu’il n’était pas impossible qu’elle fasse tout capoter juste avec son trop plein d’énergie.

Le suivant en trottinant, elle continue de tourner autour de lui comme une abeille autour d’une fleur, sautillant dans tous les sens et faisant des bonds pour éviter de se prendre les pieds sur des cailloux ou des racines un peu trop proéminentes. « Troooooop bien ! » S’exclame-t-elle avant de plaquer sa main sur sa bouche en réalisant qu’elle venait de hurler, attirant sur eux quelques regards curieux. « Décholée ! » Murmure-t-elle entre ses doigts, l’air sincèrement infligée par son manque de discrétion. Elle devait vraiment se concentrer pour ne pas parler trop fort ou réagir trop brusquement, mais elle n’y arrivait pas toujours – la preuve. Néanmoins pour aider Noah elle était prête à faire tous les efforts, ce pourquoi elle prend une grande inspiration, essayant de se concentrer. « Je veux dire, très bonne idée ! Je suis trop partante pour ça ! Je peux faire pousser plein de plantes, sur la scène, sur le sol, même sur les murs… Partout. » Ses yeux s’illuminent d’étoiles quelques instants jusqu’à ce qu’elle manque de tomber – heureusement, sa rapidité surdéveloppée lui permet de se rattraper et elle fait un petit salto avant de reprendre comme si de rien n’était. « Ce sera quoi comme pièce de théâtre ? Une histoire d’amour ? Un truc de chevalier ? Une tragédie ? Il paraît que les tragédies grecques c’est super mais un peu déprimant… Moi je préfère les trucs rigolos. Est-ce que ce sera rigolo ? » Ils arrivent à l’amphithéâtre, vide, n’attendant qu’eux pour ce fameux relooking. Satin saute sur la scène, rapide comme l’éclair, et lui fait signe de lui lancer les cartons, comme si ceux-ci pesaient un poids plume, mais n'importe qui avec un peu de bon sens comprendrait que si on lui lançait un tel carton à la figure, elle finirait probablement écrabouillée sous le poids. N'importe qui sauf elle.